Dominique Chevalier
Fondatrice de Paris l’après-midi
Rencontre avec Dominique Chevalier, fondatrice de Paris l’après-midi. Découvrez son parcours, de l’usine de filature textile de son père à l’édition textile, en passant par sa formation aux Beaux-Arts. Elle révèle sa passion profonde pour les matières et le savoir-faire artisanal.
Comment est né cet amour pour le textile, quel est votre parcours ?
Mon père avait une usine de filature textile, il développait des tissus fantaisie. J’étais souvent en contact avec les métiers de l’usine, mon père me montrait les modifications des broches qu’il inventait pour obtenir des fils spéciaux, très appréciés par les tisseurs. Par ailleurs, j’aimais créer et fabriquer mes vêtements. Ensuite, j’ai fait les Beaux-Arts, en option peinture. Avec mon premier mari, nous avons eu une galerie de tableaux, rencontré de nombreux artistes… Après le divorce, j’ai changé de cap pour gagner ma vie, j’ai fait du commercial pour des éditeurs étrangers et j’ai créé « Ido Diffusion » pour distribuer des tissus, cuirs, mobiliers… C’est dans ce contexte que j’ai eu envie d’avoir ma propre société d’édition de tissus.
Quand avez-vous créé Paris l’après-midi et pourquoi avoir choisi ce nom ?
Paris était une ville qui me fascinait quand je vivais dans le nord de la France. Y habiter et y élever des enfants n’a pas modifié mes sentiments pour cette ville. Quand j’ai voulu créer ma société d’édition de tissus, il me semblait évident que Paris devait figurer dans son nom. La recherche n’a pas été simple, c’est ma fille Éléonore Cheneau, peintre et cinéphile, qui a trouvé le nom en référence au film de la Nouvelle Vague réalisé par Éric Rohmer, L’Amour l’après-midi. C’est elle également qui a dessiné le logo.
Comment rencontrez-vous, choisissez-vous les ateliers partenaires
avec lesquels vous travaillez ?
Je choisis les manufactures avec lesquelles je travaille en visitant les salons spécialisés et par l’intermédiaire d’agents qui les représentent en France. J’ai eu parfois des déboires avec certains d’entre eux, il a fallu changer et faire réadapter les tissus chez d’autres fabricants. Je vais visiter ces manufactures pour bien comprendre leur savoir-faire spécifique et vérifier les échantillons au cours de l’évolution de la création d’un tissu. Pour les ateliers qui réalisent les références de mes collections faites à la main, le parcours pour les découvrir a été long, à travers des relations personnelles et amicales.
Quels liens tissez-vous avec eux ?
Avec ces partenaires fabricants, j’ai créé des relations de confiance réciproque. Paris l’après-midi est un éditeur de taille modeste, mais les deux parties doivent se respecter pour bien travailler ensemble. Avec les ateliers qui effectuent un travail entièrement à la main, les structures sont plus petites et la relation humaine va encore plus loin. Nous avons par exemple aidé l’un d’entre eux au moment du COVID en finançant l’achat d’un respirateur ; actuellement, nous participons à un programme pour l’éducation des enfants.
Comment sélectionnez-vous les matières premières de vos textiles ?
Je sélectionne principalement des fibres naturelles et, en fonction du rendu désiré, je chercherai un mélange plus cassant comme le lin ou le chanvre, ou au contraire de la laine pour obtenir un tomber souple et mouvant des rideaux. Pour une référence où le toucher sera important, dans le cas d’une assise, fauteuil ou canapé, la soie et le cachemire en velours donneront de la sensualité ; pour une douceur extrême, j’adopterai un cachemire feutré… Mais je peux aussi aimer de l’ortie d’Himalaya, plus brute, tissée et filée à la main pour des utilisations de type claustra…
De toutes les fibres naturelles que vous travaillez, quelle est pour vous la plus surprenante ?
Ma fibre favorite est celle du yak, elle est presque aussi douce que le cachemire, mais moins exploitée. Le Kullu qui se développe autour du cou de l’animal est une fibre plus longue que celle du cachemire et, de ce fait, elle bouloche moins. J’ai côtoyé ces animaux rustiques et très utiles pour les populations tibétaines. On y repère quelques rares yaks albinos, on utilise leur Kullu blanc pour des coloris pâles.
Découvrez plus d’informations sur Paris l’Après Midi dans l’espace Collection.
Photos : ©Franck Juery