Samuel Accoceberry
Designer Plasticien
Samuel Accoceberry, designer français partageant son temps entre Paris et le Pays basque ,
propose des créations élégantes, épurées et graphiques, explorant matières et volumes. À travers ses éditions limitées
et collectibles, il souhaite valoriser le geste artisanal et s’inscrire dans une démarche alliant savoir-faire
traditionnel et production contemporaine.
Quel est votre parcours ?
Je me suis orienté vers les arts appliqués dès le lycée, à Bordeaux. J’ai ensuite choisi d’étudier l’architecture, mais je m’y sentais créativement limité. J’ai bifurqué vers le design industriel avec un BTS. À l’époque, il y avait un véritable clivage entre le design industriel, et son côté plus artistique, dispensé dans les écoles d’art. Les deux m’intéressaient, donc j’ai poursuivi avec l’École Nationale Supérieure d’Art de Nancy. J’avais déjà cette approche transversale, l’envie de m’émanciper des cadres existants. Après mes études, j’ai travaillé en studio. Je voulais « faire mon compagnonnage », découvrir des méthodes de travail différentes. J’ai donc voyagé, j’ai travaillé en Italie, auprès d’Antonio Citterio, de Rodolfo Dordoni, puis à Paris, avec Arik Lévy, notamment. J’ai apprécié toutes ces années à répondre aux demandes d’un client, aux codes de sa marque, avec la signature d’un studio. Et c’est là aussi qu’on apprend à travailler en équipe, à monter des dossiers et préparer des projets.
Après quelques années, et après avoir bénéficié de l’ Aide à Projet du VIA ou encore remporté deux Red Dot design awards, qui m’ont apporté de la visibilité, j’ai choisi de monter mon propre studio, pour explorer toutes les facettes de ma créativité. Mais la partie création pure, sans commande, me manquait. J’avais envie de proposer des éditions limitées d’une expression plus personnelle, que je pouvais réaliser moi-même, ou en travaillant avec des artisans.
Qu’est-ce qui vous anime dans votre métier, et plus précisément
dans la réalisation de collectibles ?
En studio, ou dans le design de commande, on doit composer avec la finalité d’un objet, le discours et l’esthétique de la marque. C’est un fonctionnement enrichissant par la contrainte qu’il impose. Lorsque je concrétise une idée personnelle, l’exercice est différent, on propose une expression intime, on dévoile le ferment dans lequel on puise des éléments d’inspiration. On s’émancipe d’un brief, d’une ligne directrice. Avec cette ligne « collectible », je nourris à la fois ma curiosité, et ma liberté. Et j’exprime sans contrainte ce qui me tient à cœur .
Vous entretenez une relation très privilégiée avec les artisans,
pouvez-vous nous en dire plus ?
Je ne suis pas celui qui fait. J’imagine, et je m’entoure de personnes aux savoir-faire et gestes techniques indispensables à la réalisation d’une pièce. Ils maîtrisent la matière, les étapes de réalisation, les outils. J’aime le temps de la rencontre. D’ailleurs, je n’apporte pas forcément une idée, je laisse le temps à la découverte, afin que nous comprenions réciproquement nos univers, notre façon de travailler. Ensuite, c’est un véritable échange jusqu’à la finalisation d’une pièce. Des deux côtés, c’est une prise de risque, parce qu’on ne sait jamais comment ça va se passer, mais les échanges sont toujours enrichissants : on se transmet nos connaissances pour créer quelque chose de nouveau. Je reste fidèle aux ateliers, artisans et techniciens avec lesquels j’ai eu la chance de travailler, et il est très important pour moi de valoriser leur travail en les citant. Il est essentiel pour moi que le projet ou l’objet qui en résulte soit la narration incarnée de cette collaboration.
Quelle est votre clientèle pour ces collectibles, et comment les découvrir ?
Ces pièces uniques, en petites séries et issues de savoir-faire d’exception s’adressent aux architectes d’intérieur et aux particuliers qui recherchent des objets singuliers et expressifs pour signer un espace. Hall d’hôtel, entrée privée, salon chez un particulier, ou dans des boutiques, pour apporter une touche marquante et distinctive. Je les présente sur des salons, dans des galeries (en France et à l’étranger) , ou lors de collaborations avec des architectes et designers, comme je l’ai fait avec Minotti à l’occasion de la Milan Design Week 2024. Elles sont également visibles dans mon atelier du 13e arrondissement à Paris. Certaines sont disponibles en stock, d’autres sont réalisées à la commande, certaines sont encore à imaginer…
Quels sont vos axes de développement, vos envies ?
Je souhaite continuer à développer la démarche « collectible », bien sûr. Mais sans négliger l’autre pan de mon travail « de studio », car c’est une source d’exploration importante pour moi, un canal d’expression de ma curiosité. Pour moi, l’un ne fonctionne pas sans l’autre. C’est une manière d’être un peu polyglotte.
D’où vient votre inspiration ?
De tout ! De ce que je vois, ce que j’entends, ce que j’expérimente, de mes envies. J’essaie de tout noter, et de ne rien perdre ! Je suis curieux : mobilier, urbanisme, histoire des arts, des techniques … J’ai une inspiration en mille-feuille, et mes explorations m’ont permis de constituer une matériauthèque dans laquelle je puise. Je n’ai pas le temps de transformer toutes mes idées en objets concrets. Souvent, je laisse une idée faire son chemin, elle évolue, elle mature dans ma tête jusqu’à être presque aboutie, et je passe alors au croquis. Mais j’aime aussi laisser sa place au hasard. Par exemple, l’idée de la lampe Big Scale m’est venue en jouant avec une maquette : une pièce s’est retrouvée à l’envers, et j’ai trouvé l’aspect intéressant… j’ai poussé l’idée jusqu’au bout. J’aime ces moments où l’on sort de la maîtrise, on fait place au lâcher-prise. Le travail avec les artisans permet aussi de repenser, reformuler ses idées. J’aime rester ouvert et garder une part de spontanéité et avoir une certaine souplesse d’esprit qui me laisse entrapercevoir des possibles.
Comment s’est passée la rencontre avec Collection Latil,
et pourquoi avoir rejoint la Collection ?
Je croisais Anne-Sophie Latil sur des salons, et j’étais intrigué par ce qu’elle proposait aux artisans et aux artistes. Comme je ne suis pas directement dans le « faire », je ne m’imaginais pas entrer dans la Collection. Mais lorsque j’ai rencontré l’équipe, j’ai été séduit par cette mise en place d’un réseau vertueux, à la fois très ciblé et très ouvert, notamment aux designers, aux galeristes, éditeurs, en plus des artisans d’art. Collection Latil permet à différents métiers et approches d’entrer en résonance dans un univers commun.