Rencontres

Joseph Grappin

Comment avez-vous rencontré Collection Latil ?

À l’origine, j’ai connu Anne-Sophie alors que nous étions étudiants tous les deux à l’école Boulle. Nous avons eu l’occasion de partager à différentes occasions lors de nos études, mais aussi lors d’un échange Erasmus dans une école d’architecture intérieur et de design en Belgique. Nous dessinions beaucoup et avons eu une production importante de carnets de croquis.

Plus tard, nous nous sommes retrouvés lors d’un vernissage lorsqu’elle travaillait à la Manufacture Cogolin. Depuis, j’ai gardé contact avec elle au travers de son nouveau projet, Collection Latil.

Quels sont vos centres d’interêt ? Et quels seraient les projets futurs sur lesquels vous souhaiteriez travailler ?

Je travaille sur des projets d’hôtellerie, de restauration et des concepts de boutiques, mais aussi sur des projets de réhabilitation de maisons ou d’appartements pour des particuliers.

Ce qui m’intéresse particulièrement, c’est de développer des réponses d’aménagements singulières pour des marques ou des lieux de vie, des projets présentant des contraintes d’usages ou de fonctionnalités. C’est souvent plus compliqué à entreprendre avec les particuliers qui peuvent être réticents à l’idée de toucher à leur intérieur. L’essentiel de mon métier réside dans le dialogue et la persuasion pour convaincre les personnes de porter un projet complet de restructuration.

Je suis intéressé par toutes les situations et les contextes donnant lieu à chaque fois à de nouvelles questions d’aménagements. Il y a des éléments récurrents que l’on peut retrouver dans mes projets, comme la création de principes structurels et le travail du bois. Mais il s’agit avant tout d’une méthodologie de travail, une expérimentation qui se matérialise avec beaucoup de liberté.

À l’avenir, je souhaiterais continuer à concevoir des habitats permettant de faire évoluer nos modes de vie et d’habiter. Comment souhaitons-nous vivre aujourd’hui et comment à travers une identité, une marque, une éthique, envisage-t-on ce nouveau rapport à l’objet, à l’espace ?

Vous avez créé un espace de coworking, pouvez-vous nous en dire plus ?

Lorsque l’on entend le terme « espace de coworking », on pense très vite à ces espaces optimisés pour partager un lieu de travail, d’échanges et accessoirement de distraction. Ce sont des lieux comme il y en a beaucoup dans les métropoles, pensés pour capitaliser la location d’espace pour les travailleurs indépendants. Disponibles à la carte, ce sont des lieux impersonnels avec un ensemble d’options payantes qui s’opposent radicalement avec l’idée du collectif.

Mon espace de travail est totalement différent. Il s’agit d’un véritable atelier dont j’ai dessiné l’ensemble du mobilier afin qu’il réponde à tous les besoins d’un lieu de création. Il rassemble des postes individuels, des ensembles de rangements variés, une grande table collective, une bibliothèque, une cuisine, un espace de repos ouverts à tous. Je le partage avec des personnes dont les activités sont relativement proches ou complémentaires de la mienne et qui doivent pouvoir stimuler des collaborations possibles. Il s’agit de l’agence de paysage Now Here Studio et du bureau d’étude d’ingénierie écologique SINBIO.

Pensez-vous que Paris participe au rayonnement de l’architecture d’intérieur ?

Je suis arrivé à Paris lors de mes études et j’y suis resté pour pratiquer mon métier. Paris propose un rayonnement important pour tous les métiers du design, de par sa richesse et sa densité d’enseignes, de showrooms et d’événements culturels.

Il me semble cependant nécessaire d’aller puiser de l’inspiration ailleurs. Je m’intéresse par exemple particulièrement à la richesse de l’art contemporain, qui agit comme un déclencheur d’idées dans ma production et me permet souvent d’explorer des pistes déconnectées de toute contrainte de fonctionnalités.

Pouvez-vous nous dire à quoi ressemble votre intérieur ? Quels sont les choix que vous privilégiez ?

À l’Atelier, je suis déjà un peu chez moi. C’est un lieu de recherche avec encore beaucoup de mobilier à concevoir. J’ai le projet de réaliser des lampes ou d’autres objets d’intérieur. Je ne suis pas adepte des produits manufacturés car parfois ils ne répondent pas à la spécificité d’un lieu et sont étrangers à nos besoins. J’aime concevoir du mobilier sur-mesure qui nous aide à mieux vivre et enrichissent les espaces où ils prennent place.

Par ailleurs, j’ai designé mon appartement en duplex sur Paris. J’aime concevoir des espaces de vie qui sont pensés pour évoluer horizontalement et verticalement dans une logique d’imbrication des volumes.

Je suis attiré par la montagne (et sa représentation en cartographie), toujours dans un rapport à l’espace en trois dimensions. Elle donne un point de vue sur le paysage tout comme l’architecture « d’intérieur ». En parlant d’architecture d’intérieur, je trouve ce terme réducteur parce qu’il sous-entend qu’on ne touche pas à l’enveloppe. Pourtant, il me semble que l’architecture et le design de projet sont indissociables quand il s’agit de redéfinir les fonctionnalités d’un lieu. C’est un métier qui est mal connu et il me semble qu’il n’a pas trouvé sa terminologie adéquate. 

Vous concevez aussi votre propre mobilier, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

Je réalise du mobilier sur-mesure dessiné pour un espace qui lui est propre. Je pense le concept du projet jusque dans le détail. Je ne designe pas du mobilier pour me faire plaisir, pour moi c’est pour répondre au plus proche au cahier des charges et à notre intention. Les mobiliers que j’ai pu dessiner ont souvent une histoire qui est liée à un lieu, à un projet.

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