Rencontres

Alexia Leleu

Directrice Artistique de Maison LELEU

Rencontre avec Alexia Leleu, directrice artistique, designer, et entrepreneuse déterminée à raviver l’héritage familial avec Maison LELEU, fondée par son arrière-grand-père et relancée en 2018 suite à la découverte des archives de la Maison.

Quelle a été votre motivation à relancer Maison LELEU ?

 

La motivation à relancer Maison LELEU est ancrée dans notre histoire familiale, nourrie d’anecdotes sur les réalisations prestigieuses de la Maison, comme la décoration des paquebots et du Palais de l’Élysée. À 30 ans, j’ai entrepris des recherches sur ma famille et son histoire, aboutissant à la découverte des archives de la Maison. Par chance, Madame Siriex, une femme exceptionnelle, ancienne secrétaire de mon arrière-grand-père, a décidé, à la fermeture de la Maison en 1973, de récupérer toutes les archives jetées par ma famille et de les conserver précieusement pendant plusieurs décennies.  C’est la découverte de ces archives qui signe pour moi le début de cette grande histoire :

Faire revivre la Maison LELEU, la justesse des designs, la modernité et l’élégance qui s’en dégagent encore aujourd’hui… Il m’était impossible de laisser ce patrimoine tomber dans l’oubli.

Comment avez-vous abordé ce projet, une fois votre décision prise ?

 

J’ai retrouvé les archives LELEU en mars 2017, et tout est allé très vite. J’ai eu un coup de foudre pour les motifs des tapis, mais ce n’est qu’après avoir étudié l’histoire du mobilier et de ses grands designers, que j’ai réellement pris la mesure de la puissance artistique du mobilier LELEU. J’ai donc décidé de quitter mon emploi dans l’industrie pharmaceutique en juillet 2017 et d’intégrer l’école Boulle, tout en préparant le lancement de la partie Tapis prévue pour janvier 2018.

Parallèlement, nous nous sommes fait accompagner pour une expertise minutieuse des tapis d’époque, afin d’identifier le savoir-faire utilisé par ma famille. Nous avons identifié ce nœud si spécifique qui permet aux tapis LELEU d’être uniques, de s’exprimer et de vibrer au sol. Nous avons déterminé le diamètre des brins de laine, le nombre de brins par nœud… et nous avons sollicité des artisans aux savoir-faire ancestraux. Puis nous avons relancé le mobilier et les luminaires en 2020. Je me suis entourée d’un associé ébéniste de formation, Franck Cacioppo qui m’aide sur toute la partie technique. Et en septembre 2020, nous avons également lancé avec Lelievre nos tissus et papiers peints.

Deux ans de recherches ont été nécessaires pour retrouver et rassembler les archives de la maison. Qu’avez-vous ressenti en retrouvant les premiers documents ?

 

Je suis arrivée dans l’ancien appartement de Madame Siriex et j’ai découvert tous ces cartons d’archives. C’était irréel. Je ne m’attendais pas à découvrir un tel trésor : dessins, livres de commandes, lettres de correspondances… J’ai eu les larmes aux yeux, j’étais dans un monde parallèle où il m’était possible de rencontrer et ces membres de ma famille que je n’avais pas connus, de découvrir la beauté et l’intensité de leur travail… Cela restera la plus fabuleuse découverte de ma vie !

Quelles relations Maison LELEU a tissées ou ravivées avec les manufactures
ou ateliers de production ?

 

Ma famille travaillait avec quelques artisans en interne, mais avait surtout l’habitude de s’entourer des meilleures manufactures en fonction des savoir-faire recherchés : Raymond Subes pour le fer forgé, Sain et Tambuté pour la laque, Aubusson pour les tapisseries, les ébénistes du quartier Saint-Antoine… Dès le début, j’ai souhaité renouer avec les manufactures de l’époque. Pour les luminaires, j’ai contacté Perzel, et Baccarat pour tous nos lustres en cristal… Pour la laque, j’ai retrouvé l’atelier Sain et Tambuté (AML Déco aujourd’hui) et j’ai ressenti une joie incroyable quand j’ai découvert que les échantillons de couleurs de laque LELEU signés par mon arrière-grand-père avaient été conservés par leurs équipes.

Quelle est votre clientèle ?

 

Elle est composée autant de particuliers que de professionnels, et très internationale (USA, Europe, Asie). Aujourd’hui, nous travaillons, comme avant, pour un grand nombre de personnalités et pour un des PDG d’entreprises du CAC 40, amateurs d’art et collectionneurs.

Concernant les professionnels, nous travaillons beaucoup pour de grandes marques de luxe (Cartier, Lanvin, Chopard, Piaget…) et pour les plus beaux noms de l’hôtellerie (Claridges, Cheval Blanc, Bristol, Sacher, Belmond…). Mais nos clients principaux sont des architectes d’intérieur et décorateurs qui prescrivent nos créations sur leurs projets qu’ils soient publics ou privés. Nous avons notamment travaillé avec Laura Gonzalez, Humbert et Poyet, Robert Couturier, Steven Gambrel, MBDS, Harrods, Studio Shamshiri, Commune Design

Comment accompagnez-vous vos clients sur leurs projets, sur leurs choix ?

 

La Maison est riche d’un patrimoine exceptionnel de milliers d’archives. Les trois enfants de Jules Leuleu, entrés dans la Maison dès les années 30, ont été aussi prolifiques que mon arrière-grand-père. Cinquante ans de créations par quatre designers passionnés… C’est une source inépuisable d’inspiration pour nos clients ! J’ai parcouru, étudié, manié et numérisé l’ensemble de ces dessins avant de les confier à des musées. J’ai donc en tête l’ensemble du répertoire LELEU. Je peux guider nos clients en fonction de leurs envies et du style recherché, le plus souvent sous forme de moodboards et de sélections d’archives plus confidentielles, qui ne sont pas visibles sur notre site internet. Nous repensons des designs anciens en les adaptant aux modes de vie actuels et nous élaborons aussi de toutes nouvelles créations.  Je pense par exemple à un client qui était tombé sous le charme du piétement de notre console Christian, mais venait initialement pour un bureau. Nous avons repensé la console pour conserver les éléments de design tout en répondant à son besoin.

Quels sont vos axes de développement, vos envies pour Maison LELEU ?

 

Être à la tête de Maison LELEU est un « rêve éveillé ». Je suis très fière que l’un de mes premiers dessins, le fauteuil Mava, soit entré dans les collections du Mobilier national. Rejoindre cette sélection avec mes propres créations plus de 50 ans après la mort de mon arrière-grand-père, qui a fondé la Maison, a pour moi une véritable symbolique : LELEU était notamment reconnu pour ses ensembles décoratifs au sein de bâtiments d’État comme les ambassades, le Palais de l’ONU à Genève, le train présidentiel… La Maison, à travers son histoire, et celle de ma famille, a été un designer et éditeur iconique dans la haute décoration, qui proposait également un véritable service de décoration d’intérieur.  Mon rêve est donc de continuer son développement afin d’englober la partie décorative et de proposer un service complet d’ensemblier décorateur emblématique. Enfin, j’ai la volonté que LELEU participe à la préservation des savoir-faire français qui tendent aujourd’hui à disparaître. Je pense que nous avons un rôle important à jouer et je m’efforce d’être engagée dans cette démarche.

Comment s’est passée la rencontre avec Collection Latil,
et pourquoi avoir rejoint la Collection ?

 

J’ai rencontré Anne-Sophie il y a plusieurs années. J’ai beaucoup aimé son approche par la matière et sa sensibilité aux belles choses. Quand Anne-Sophie nous a proposé de nous représenter, cela a été naturel pour moi.  Sa démarche, en adéquation avec notre vision de « préserver et promouvoir » les savoir-faire et le rayonnement de la France à l’étranger, a sonné comme une évidence : c’était déjà la volonté de Jules Leleu, que je partage également aujourd’hui.  Rejoindre Collection Latil était naturel, car c’est un moyen pour moi de montrer les liens entre art, artisanat, design… Ces disciplines parallèles qui se nourrissent entre elles.

 

 

Retrouvez également Maison LELEU dans l’espace Collection.

Photos :  ©Maison Leleu

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